à propos

Des lignes de grain, des super-cellules, des orages extrêmes, nous en subissons depuis la nuit des temps. Aujourd’hui, galvanisées par le phénomène de dérèglement climatique, les cellules orageuses délivrent un volume d’eau bien plus important qu’auparavant. 

44mm, c’est ce qui est tombé à Cressier le soir du 22 juin, en une heure environ. Deux orages ont fusionné et stagné au dessus de la région, déversant leur fureur sur un terrain d’ores et déjà gorgé d’eau – alimentant le Ruhaut et le Mortruz – dont les lits étaient bien trop petits pour contenir des précipitations d’une telle ampleur.

Au matin, le niveau d'eau dans cette fontaine affichait 94mm !

22 Juin 2021, 19h45

Les premières alertes ont été signalées mardi vers 19h45. En tout, la centrale neuchâteloise d’urgence a reçu plus de 500 appels. Environ 75 bâtiments ont été touchés.

La police et les forces d’intervention – près de 120 personnes – ont œuvré toute la nuit pour stabiliser la situation. Aucune personne blessée ou disparue n’a été à déplorer.

Plusieurs familles ont en revanche du être relogées en raison des dégâts d’eau mais aussi à cause des coupures d’électricité. Un élan de solidarité sans précédent s’est mis en place.

La solidarité se met en place instantanément

23 Juin 2021, 06h30

Le calme après la tempête. Le village se réveille sonné par l’ampleur de la dévastation alors que les espoirs d’un mauvais rêve s’estompent.

Un choix s’offre alors à moi. Reprendre une pelle pour continuer d’aider ou nécessaire, ou prendre mon appareil photo pour tenter d’immortaliser le village le ventre ouvert. Choix logique.

Une idée s’impose dès le départ: figer les ruelles et les maisons, du haut du village au sous-voie, avant que la fourmilière humaine et mécanique ne se mette en marche. L’avantage d’être du village, c’est d’y être avant la presse.

Il n’est pas encore 7h00 que des dizaines de clichés sont dans la boite, suivis bientôt par d’autres. Les sujets sont infinis, quel que soit l’endroit où je pose mon regard.  

Sur ma gauche, je vois la voiture de Sarah dramatiquement encastrée dans la maison. A ma droite, Raymond pleure les restes de son magnifique jardin. Plus bas, Maria et sa famille étalent sur le sol de leur salon les nombreux albums photos pour tenter des les sauver, après que leur cave ait été totalement submergée. Des histoires comme celles-là, il y en a des centaines d’autres. Chacun en a une à raconter.

La "chatastrophe" laisse certains indifférents

Le Ruhaut n’est pas le seul ruisseau à être sorti de son lit, Cressier étant traversée également, dans son quartier Ouest des Argilles, par le Mortruz. Là aussi, les dégâts ont été conséquents.

Le quartier des Argilles, à l'Ouest de Cressier, à également été touché. ©Laurence Pfaff

Pour ce reportage, j’équipe mon Nikon D810 d’un Fisheye 15mm f/2.8 (ultra grand-angle). Traitement sur Lightroom. La vraie difficulté de ce reportage, c’est de se retrouver la position et l’angle exact de la photo d’origine! A la fin de la journée, ce sont environ 650 clichés, dont 33 seront sélectionnés pour faire l’objet de cette exposition.

Juin 2022

Cressier, 1 an après. Les photos dorment depuis presque une année sur un disque dur, attendant patiemment d’être réveillées, et avec elles les souvenirs d’un évènement exceptionnel.

Exceptionnel parce qu’une année après, le village panse toujours ses plaies. Si les gens ont repris le cours de leurs vies, le village, lui, porte toujours les balafres des pelles mécaniques, visibles sur certaines façades ou sur les rues (photo 2 & 5). 

Accomplir l’ensemble des travaux prendra encore quelques années de plus. Les propriétaires des bâtiments du haut du village, les plus touchés, sont pris dans les rouages de procédures administratives lentes et compliquées, qui leur demandera la plus grande patience.

Pour certaines personnes, le passage d’un simple orage d’été les ramène instantanément à ce jour de juin 2021. Un évènement qui laisse de profondes traces dans les esprits, à l’instar des murs des maisons du centre du village.

 
Une année après, le village porte toujours les cicatrices de l'évènement

Mais… elles nous ramènent également à l’élan de solidarité sans précédent qui s’est mis en place, le soutien infaillible des gens d’ici et d’ailleurs, des autorités, des pompiers, de la protection civile, de l’armée et des entreprises de tous bords, assurant les donations en eau et en nourriture, la collecte d’habits, et bien plus encore. 

 
Merci aux entreprises de construction pour leur engagement sans faille.

Un certain temps sera nécessaire encore, avant de cicatriser les plaies d’un 22 juin qui restera définitivement dans toutes les mémoires. 

Malgré tout notre malheur, rappelons-nous de la chance que nous avons de vivre ici, à Cressier, et que la vie continue, parmi tant de gens formidables.

Alexandre W.

 

 

Mes remerciements vont à:
  • Commune de Cressier
  • Robin Nyfeler
  • Maria Biundo
  • Yann Berger
  • Laurent, Joelle et Rosario Floridia
  • Christian Fellmann
  • O2S Office Space Solution / Julien Martin
  • Caveau de l’Entre-deux-lacs / Claude Jacot
  • & ma famille, Angela, Timéo et Niobée Adam

Cette exposition photographique a été réalisée avec le soutien du Consortium « Vieux-Moulin Cressier » regroupant les entreprises Facchinetti SA et Bieri-Grisoni SA, engagées des premières heures de la catastrophe à ce jour.